Dr Mohamed Mosaad : Ce qui manque, c'est un mouvement de la paix arabe

Cahiers Bernard Lazare, n° 225, mai 2002

Mohamed Mosaad est égyptien, psychiatre et sociologue, militant pour la paix et responsable du Abrahamic Forum.

Source : Interfaith Web dialog.

La violence en Israël et en Palestine a atteint un niveau sans précédent.

Elle fait maintenant la une de tous les bulletins d'informations. Le cercle vicieux de la violence est sans fin, tout le monde le sait. La question est : qu'attendons-nous, ou qui attendons-nous ? Attendons-nous le gouvernement israélien, politiquement stupide ? L'Autorité Palestinienne stratégiquement aveugle ? Les Etats-Unis, complètement indifférents ? L'Europe, qui ne sait que supplier et condamner ? Les pays arabes, qui ne savent que bâiller ?

Depuis un an et demi, tous ont prouvé, chaque jour, leur impuissance. En réalité, depuis un an et demi, le seul espoir est venu du camp de la paix israélien. Pas seulement de La Paix Maintenant, qui s'est réveillée, mais de nombreux mouvements pour la paix, et de nombreux militants qui manifestent, font campagne, se battent pour un avenir meilleur. Un Arabe paresseux, les pieds en éventail, dirait "Et alors ? ..., la paix n'est pas là ! Vous n'avez pas regardé la télévision aujourd'hui ?"

Cet Arabe, les pieds en éventail, constitue la raison même pour laquelle la paix est devenue si difficile à atteindre. Attendre les mouvements israéliens pour la paix n'est pas assez. Comme on dit en Egypte, il n'y a pas une seule main qui ait applaudi ! Ce qui rend ces mouvements impuissants, c'est qu'au moment même où les militants de La Paix Maintenant faisaient la queue à l'Hôpital Al Maqased pour donner leur sang aux victimes palestiniennes dans les camps de réfugiés, une bombe y explosait, actionnée par un terroriste kamikaze ! En attendant que les Arabes répondent à ce terrorisme en faisant la queue pour donner leur sang aux victimes israéliennes civiles, ces mouvements, malheureusement, resteront marginaux.

Depuis un quart de siècle, l'Egypte est en paix avec Israël. Et, si l'on excepte le plan bizarroïde du Ministre (ex-ministre aujourd'hui, N.D.T.) Avigdor Lieberman de bombarder le barrage d'Assouan, personne ne parle de guerre, ni d'un côté ni de l'autre. L'Egypte a récupéré jusqu'au dernier millimètre carré de ses territoires, et sa frontière avec Israël est absolument calme. Et néanmoins, il n'est pas rare d'entendre des écrivains, des intellectuels et des universitaires déclarer à la télévision que tel bébé israélien est sioniste, et qu'il pourrait/devrait être tué. Quel message ces intellectuels stupides envoient-ils, et quelle promesse La Paix Maintenant peut-il porter à la société israélienne ?

Ce qui manque, clairement, c'est un mouvement de la paix arabe, qui devrait se lever ici et maintenant, tout de suite ! C'est la seule façon pour obtenir la paix et la garantir, aujourd'hui comme demain. Il faut une coalition des mouvements de paix israéliens et arabes, pour dire aux masses israéliennes et arabes que la paix est possible et riche de potentialités. Il faut une coalition israélo-arabe pour la paix, pour faire pression sur les politiciens, les colons et les milices palestiniennes, et il est essentiel d'en revenir à la poursuite d'un accord de paix. De plus, seule une telle coalition serait capable de faire passer le processus de paix des sphères politiques, économiques et sécuritaires, dominées par les politiciens, aux sphères sociales et culturelles, animées par les militants, les intellectuels, les écrivains, etc. En résumé, elle pourrait conduire le processus de paix hors du petit pré-carré officiel nommé "normalisation", vers un vaste paysage social nomme "intégration".

Voilà quelle doit être la mission des Arabes éclairés, et particulièrement en Egypte et en Jordanie, pour commencer à panser les plaies des deux côtés.

C'est le moment de franchir les barrières physiques et mentales, de se joindre aux militants israéliens pour la paix, et de marcher ensemble vers un avenir meilleur, pour tous. Il n'y aura pas de paix sans franchir ce pas, urgent et essentiel.

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Brèves

Notre tradition

Il y a longtemps, dans une synagogue d'Odessa avait lieu un service religieux.
La moitié des présents s'est mise debout, et l'autre moitié est restée assise.
Les assis ont commencé à réclamer que les autres se rassoient, et ceux qui étaient debout ont réclamé que les autres suivent leur exemple...
Le rabbin, qui ne savait pas quoi faire, décida de s'adresser au fondateur de la synagogue, le vieux Moïché. Il invita un représentant de chaque fraction, et ils allèrent tous chez Moïché pour lui demander conseil.
Le représentant des "debout" demanda :
- Être debout pendant le service – est-ce notre tradition ?
Moïché répondit :
- Non, ce n'est pas notre tradition.
Le représentant des "assis", tout content, demanda :
- Alors, se tenir assis pendant le service – est-ce notre tradition ?
Moïché répondit :
- Non, ce n'est pas notre tradition.
Le rabbin, perplexe, dit :
- Mais... pendant le service, une moitié se met debout et l'autre reste assise, et les querelles s'ensuivent...
- Voilà! - dit le vieux Moïché. - Ça, c'est notre tradition !